lundi 7 janvier 2008

3 nausées, 4 crabes à carapace molle et une bouteille de rouge

Ce soir est un grand soir, c'est une première, une expérience sans précédent dans ma cuisine: je vais cuisiner des crabes à carapaces molles. Oui, vous en avez peut-être déjà mangé en sushi, mais admettez que bien au chaud dans son enveloppe de tempura, le crabe à carapace molle n'est pas très dangereux (si vous ne connaissez pas cet animal, sachez que c'est un petit crabe qui a la particularité de se manger en entier). Il faut dire que je suis un peu échaudée par ce genre de "nouvelles expériences culinaires". J'ai déjà derrière la cravate 3 expériences absolument ratées de cuisson/préparations de produits de la mer hors du commun, et les trois tentatives furent couronnées de hauts le coeur dés la première bouchée et de spasmes incontrolables de l'oesophage à la seconde, malgré ma bonne volonté. Il faut comprendre que je suis une adepte des expériences culinaires extrêmes et que je n'apprends pas de mes erreurs. Je prends nécessairement sur un menu ce qui me semble le plus étrange, dans la mesure où il y a un potentiel gustatif intéressant.

Palmarès (à date) de mes pires expériences avec des fruits de mer (dans ces cas précis, les photos ne sont pas de moi, lien vers la source clicable en bleu):

Troisième position: les crevettes géantes d'eau douce, entières (tête et pattes qui ressemblent à des pattes de scampi, une crevette doit peser au moins 150g). Quatre mots: énorme, goûte la vase. Vraiment, c'était hyper ordinaire, même la sauce au curry n'a pas réussit à cacher le goût de fond de marécage. Manque de chance ou produit peu intéressant? Je ne sais pas, si vous croyez pouvoir me convaincre du bien fondé de cet animal dans mon régime alimentaire, je veux bien venir en manger chez vous. En plus, ce n'était pas assez cuit, et dieu sait qu'une crevette pas assez cuite, c'est dégueulasse...

Deuxième position: Couteaux cuisson vapeur (le couteau est une sorte de palourde qui, il semblerait, est un délice. Ah bon... Je suis très déçue, c'était un de mes fantasmes culinaires).
Dans ce cas, c'est peut-être un peu de ma faute, mais de grâce, les poissonniers, pourriez-vous apprendre à connaître votre produit et expliquer un peu mieux comment le cuisiner? Oui, je savais qu'il ne fallait pas trop les faire cuire, que dans ce cas, ça se transformait en chambre à air, oui, je savais qu'il fallait les faire dégorger, sous peine de manger une tonne de sable MAIS!: j'ai fait dégorger des heures à l'eau salée, j'ai cuit très peu de temps, et c'était DÉGUEULASSE! J'ai manqué vomir à la deuxième bouchée, c'était carrément comme mâcher de la gomme aux palourdes tout en mastiquant un shooter de sable. La prochaine fois, basta, je mange ça au resto (ils en servent au restaurant Pied de cochon, l'été, dans leurs plateaux de fruits de mer).

Première position: Oursins frais à décortiquer soi-même. Là, comme dirait mon beau frère qui a vécu la même situation, j'ai frappé mon Waterloo. J'avais déjà mangé des oursins en sushi et bon, avouons que le goût est spécial, c'est très iodé et ça a la texture de foie mi-cuit, c'est jaune caca d'oie et on sait que c'est une gonade, donc un organe sexuel. Mais, tout de même, de temps en temps, j'aime bien en manger un ou deux, ça change de l'ordinaire. Je me suis donc extasiée le jour où j'ai vu des oursins frais chez Norref, j'en ai acheté quelques uns, toujours aussi emballée. Ça s'est gâté rendu à la maison, quand j'ai ouvert le sac. Mmmm... j'ouvre ça comment? Recherche sur le net, dans mes livres etc. Tient, pas de photos de l'intérieur non nettoyé d'un oursin, pourquoi? Mais parce que c'est HORRIBLE! On doit ouvrir l'animal vivant au ciseau et le décaloter du côté des "dents" qui bougent encore, on enlève le cercle et, à l'intérieur, SURPRISE! un liquide noir comme la mort et à l'odeur de marécage (encore une fois...). Bon, ça va encore, je suis forte, je peux tout supporter... Je trifouille et sort quoi? Non, pas une jolie gonade toute jaune, mais une tonne de genre de cheveux aglutinés et mouillés, verts-noirs. Miam miam! (J'apprendrai plus tard que ce sont simplement des algues que l'oursin ingurgite et digère doucement, mais sur le coup, je n'avais en tête que le petit moton de cheveux mouillés qu'on sort du trou du bain quand il est bouché, YUK!). En creusant encore, on trouve finalement une gonade et on la met péniblement dans sa bouche devant le regard pas convaincu de notre chum et de notre soeur. Oui, ça goûte l'oursin. C'est normal, c'est un oursin. Pas immonde, mais IMPOSSIBLE de s'enlever l'image des cheveux et des dents qui vibrent. J'ai le goût de vomir. Je fais ma brave, j'en prends une autre bouchée, ça y est, j'ai encore été trop loin, tout ça se met à me remonter dans la gorge. Prochaine fois, RESTAURANT!

Pourquoi je m'inflige ça? Je sais pas, et c'est pour ça qu'en passant devant le super spécial 4 crabes à carapace molle congelés pour 8$ chez Norref, le génie de la cuisine m'a obligé à tendre la main et à aggriper 4 de ces merveilleuses petites bêtes, puis à les mettre dans mon petit panier, convaincue que je venais de faire l'affaire du siècle.


Quelques mois plus tard...

Sur un coup de tête, je fais dégeler tout ça, allez, ça va être GÉNIAL!

Oups, plus si certaine, regardez-moi la gueule que ça a, et encore, là je les mets en scène et on rigole, mais si vous aviez vu les photos sur le ventre :O

Sans blague, c'est tellement moche que quand, en tirant un peu sur une patte pour la séparer du coffre congelé, celle-ci m'est resté dans la mains: J'AI FAIT LE SAUT!

Bon, je vous épargne certains détails comme "la texture de tout l'animal est celui de peau humaine âgée" et "ces choses me font vraiment penser à des scorpions" (désolée, je vous avais dit que je vous épargnais ces détails, mais c'est plus fort que moi, je dois absolument vous faire comprendre le dégoût qui s'est emparé de moi contre toute attente en préparant les bestioles). Sachez tout de même que la panique m'a pris en me disant que peut-être les crabes n'avaient pas été "nettoyés" correctement. J'ai sur le champ téléphoné chez Norref pour demander s'ils étaient prêts pour la consommation "Oui, on m'a dit que tout se mangeait madame (madame?)". Bon... je suis plus où moins convaincue mais ça va aller. Mais là, horreur, je soulève un des crabes et le coffre se décolle légèrement et je remarque DES BRANCHIES! OU-A-CHE! Une recherche sur le net plus tard (ici) , je suis toute heureuse, je trouve en image une description de ce que l'on doit enlever sur un crabe à carapace molle avant de le manger (pour être honnête, je suis certaine qu'on peut très bien ne rien enlever de tout ça, mais ça m'a vraiment fait du bien de me dire que ces trois éléments ne se retrouveraient pas dans mon gosier: les branchies, les bouche/yeux etc., la queue qui es carrément affreuse). Pas de photo pour vous, là je vous épargne pour de vrai. J'ai ensuite coupé, sur la demande express de Louis, les petites bêtes en 4. Étrangement, je me rend compte que plus il y a d'étapes entre l'animal entier et mon assiette (et très éventuellement ma bouche et encore plus éventuellement mon estomac), plus je suis en paix avec ce plat. SUPER, ça va mieux! Que faire, maintenant, car il ne reste qu'à faire cuire... bien, tient, je vais faire tremper dans le lait. Pourquoi? Pour rien, juste pour faire une étape de plus et oublier au frigo une petite heure, le temps de boire du vin et être "relaxe".

Sachez que je ne fais jamais de friture, mais là, Louis mérite ce petit écart, et moi aussi en passant. Il me semble que le "non croquant" des bêtes sera plus tolérable ainsi.

Pour le reste, bien voilà les images et recettes...


Friture de crabe à carapace molle (deux portions)

4 crabes à carapace molle congelés
1 t. de lait (ingrédient non nécessaire)
1 t. farine assaisonnée de sel et poivre (si vous le désirez, vous pouvez ajouter de l'assaisonnement à poisson du commerce ou de la cayenne)
Huile pour friture (un pouce dans le fond d'une grande poèle)

Décongeler à l'eau froide courante ou au frigo les crabes congelés. Nettoyer les crabes selon cette technique en enlevant les branchies, la "tête" et la queue. Couper les crabes en 4 sections en prenant soins de garder la carapace après chaque morceau. Déposer dans le lait au frigo une petite heure (étape psychologiquement nécessaire dans mon cas, mais probablement sans conséquence sur le goût du produit final). Égoutter et bien enfariner les sections. Faire chauffer l'huile à feu moyen-fort jusqu'à ce qu'un peu de farine fasse des bulles et grésille lorsque saupoudrée dans l'huile. Déposer délicatement les sections de crabe dans l'Huile, faire cuire environ 2 à 3 minutes d'un côté, puis tourner et faire cuire encore 2 à 3 minutes, jusqu'à ce que le tout soit très bien doré. Égoutter sur un papier absorbant. Servir immédiatement.


Sauce tartare à l'aneth légère (pour 4 à 6 portions)
1 c. soupe d'aneth frais haché
1 c. soupe de persil plat haché
1 c. thé de câpres hachées
1 c. soupe de relish (oui, je sais, j'aurais du mettre des cornichons mais j'en avais pas)
1 c. thé de jus de citron
Poivre du moulin au goût
4 traits de tabasco
2 traits de sauce anglaise
4 c. soupe de yogourt nature
2 c. soupe de mayonnaise régulière

Mélanger tous les ingrédients, laisser reposer au moins 1 heure au frigo pour que les saveurs se mélangent. Vous pouvez omettre l'aneth si vous voulez.

Pour accompagner tout ça: des pommes de terre yukon gold en quartiers avec sel, poivre et huile d'olive tout simplement cuites au four et retournées jusqu'à cuisson complète et une petite salade mesclun avec des tomates cerises, assaisonnée de poivre, huile d'olive et vinaigre balsamique.

Verdict: TRÈS BON!!! Bon, Louis n'étant pas habitué à me voir autant réagir face à la préparation de nourriture, je lui ai fait peur et il est resté un peu hésitant, mais il admet que c'est bon et qu'il en remangerait avec plaisir.

Paulette, elle, est tombée en amour pour une seconde fois cette semaine (vous vous souvenez bien entendu de l'épopé du pigeon) et a dévoré son morceau en un clin d'oeil en roucoulant ensuite tout le repas autour de nous.

Ainsi, je suis bien contente, c'est succulent, le goût est fin, la sauce n'a presque pas été nécessaire (j'en avais fait une tonne pis une barge pour être certaine de bien cammoufler le crabe au besoin) mais c'est assez bourratif. On est pas trop habitués à la friture, que voulez-vous! Essayez avec juste du citron, c'est je crois encore meilleur!

Pour l'achat des crabes (si je ne vous ai pas trop fait peur), vous les retrouverez entre autre chez Norref au prix régulier, si je me souviens bien, de 2,50$ l'unité dans le comptoir des crabes surgelés.


5 commentaires:

Katia a dit…

Aaaaaaaaaaah je savais bien que ça serait bon :)

Toutefois, je retiens tes mauvaises expériences avec les fruits de mer. Je suis moi-même du genre à vouloir tout goûter, alors ça m'évitera des surprises désagréables. Si tu n'apprends pas de tes erreurs, au moins elle serviront à quelqu'un d'autre !! :)

Jasmine a dit…

Courageuse, va! Moi, je suis incapable de manger quelque chose qui a des yeux et qui me regarde... hi hi hi. Déjà apprêté et noyé dans la sauce, ça peut passer. Mais si je dois préparer moi-même, au diable!

Je découvre ton blog grâce à Katia et je l'aime déjà! Tes histoires sont amusantes, je vais suivre tes péripéties culinaires.

Mariane a dit…

Wow! ça semble délicieux! J'suis pas assez aventurière pour le cuisiner, ce crabe... Mais tu m'as donné le goût et j'irai donc le déguster, en toute sécurité, chez... Yakata, mon resto préféré! Une de leur spécialité paraît-il mais je n'ai toujours pas tenter l'expérience à leur table... ni à la tienne d'ailleurs! (oups! une fille s'essaie!) Alors, je me jette à l'eau (notez, ici, le jeu de mot!), et je t'en reparle...

Gil a dit…

bravo, c'est bien de découvrir...Pas facile mais courageux !

biz

ti-casse et ces recettes a dit…

j'adore ton blog
que de belle recettes et de tres beau texte
si tu ne connaisait rien au ordinateur bravo et chapeau pour toute tes présentation
norman
(ti Casse)