Mon père n'est pas un fin cuisinier, mais il a ses bases, ses recettes, ses classiques, et ceux-là, il les maîtrise à la perfection! J'ai d'excellents souvenirs de plats que mon père cuisinait durant mon enfance. Rien de très avant-gardiste en général, mais c'était un mélange de cuisine familiale, d'influences italiennes de par notre lieu de vie géographique et irlandaise de par nos origines lointaines, de cuisine économique car on était pas riches mais surtout, il cuisinait avec "une intention". Son intention, c'était de nous faire plaisir. Sa cuisine était ponctuée, quand nous allions le visiter, de petites attentions.
Le matin de semaine, on mangeait en général de simples céréales. MAIS, même si nous nous levions "aux poules", il avait déjà mis la table, déjà placé les verres, les bols, tout était en place. Il dormait, mais il était là, il avait pensé à nous.
Pour nos lunchs, ça ne volait pas bien haut en général. Un sandwich de pain de mie, blanc bien entendu, une viande de mauvaise qualité trop souvent, de la moutarde jaune, MAIS, il y avait toujours une surprise, un petit gâteau, un fruit exotique, un jus spécial du type nectar d'abricot... Quand j'ouvrais mon sac, le midi, je pouvais l'imaginer aller choisir un petit quelque-chose d'excitant au dépanneur, je le voyais se demander ce qui me ferait plaisir, et j'adorais ça!
Il n'avait aucune notion de nutrition à proprement parler, mais ce n'était pas bien important, pour ça, ma mère battait tous les records et puisque je vivais avec elle la plus grande partie du temps, j'étais constituée au moins à 90% de bio, de granole, de nutritif. J'étais une enfant "intégrale" à 90%. Je valais cher du kilo!
Un des repas que j'aimais le plus manger chez lui, c'était son "oeuf dans le trou", ou sa version très gastronomique en "sandwich western". L'oeuf dans le trou est d'une simplicité désarmante et je ne comprends pas que ça ne soit pas plus populaire. Quand j'en fais, tout le monde est aux oiseaux et même ceux qui n'aiment pas les oeufs à la poêle sont heureux. La version "sandwich western" est un sandwich aux tomates, avec laitue et mayonnaise, mais dont la tranche de pain grillée du dessus est faite d'un oeuf dans le trou. Attention, là, ça arrache! Vous pourriez inviter vos beaux parents avec ça qu'ils partiraient avec un souvenir impayable de leur repas!
J'aime bien utiliser des petits ou extra-petits oeufs pour cette recette très complexe. Ils cuisent plus rapidement et ne sortent pas du trou pour couler dans toute la poêle. Au marché Jean-Talon, il y a même un marchand qui vend 30 oeufs pee-wee pour 2$ pas de taxe! Ici, j'étais déchaînée, j'ai ajouté une tranche de ruban orange sur mon pain. Le ruban orange, c'est le nom commercial du pseudo fromage en tranche orange qui n'est pas du fromage et qui brûle plutôt que de fondre. Je sais que c'est dégueulasse mais bon, une fois n'est pas coutume et quand on parle de cuisine d'enfance...
L'oeuf dans le trou de mon paternel
1 tranche de pain de mie
1 petit oeuf
1/2 c. thé de beurre
sel et poivre
au choix: fromage, tomate, laitue, jambon, bacon etc.
À l'aide d'un verre (dans lequel vous aurez dégusté un bon pastis pour vous inspirer culinairement parlant), faire un trou au centre de la tranche de pain.
Déposer la tranche trouée dans une poêle où vous aurez fait fondre le beurre, ainsi qu'à ses côtés, la rondelle de pain. Laisser chauffer puis casser l'oeuf au centre du trou en prenant soin de ne pas le laisser couler sous la tranche. Laisser dorer bien comme il faut avant de retourner à l'aide d'une spatule.
Terminer la cuisson et servir immédiatement avec la rondelle de pain en extra en guise de mouillette. Déguster en sandwich western, tartiné de mayo, en sandwich ouvert aux tomates ou comme il vous plaira finalement, car l'idée de ce repas c'est de se faire plaisir. Vous pouvez même en faire des rouleaux de printemps...